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Lex Inside du 13 septembre 2022 – Réseaux sociaux : preuve contre un salarié en cas de litige avec l’employeur ?

Pierre Chevillard répond à des questions sur les communications des salariés sur les réseaux sociaux dans l’émission “Lex Inside” présentée par Arnaud Dumourier.

13 septembre 2022 dans Le Monde du Droit et Décideurs TV

Arnaud Dumourier (AD) : Au programme de ce numéro, nous répondrons à la question suivante :
Les réseaux sociaux peuvent-ils constituer une preuve contre le salarié à l’occasion d’un litige avec son employeur ?

Dans un premier, est-ce qu’un employeur a un droit de regard sur les propos et les échanges émis sur les réseaux sociaux par ses salariés ?

Pierre Chevillard (PC) : La question que vous posez fait appel aux 3 concepts suivants :

– La liberté d’expression du salarié ;
– La vie privée du salarié ;
– La question de la preuve.

On doit systématiquement faire appel à ces 3 notions lorsque l’on s’intéresse à l’utilisation des réseaux sociaux par les salariés.

AD : Qu’en est-il de la preuve ? Est-ce que les propos publiés sur les réseaux sociaux peuvent être invoqués dans le cadre d’un litige avec l’employeur ?

PC : Les propos utilisés par les salariés sur les réseaux sociaux peuvent, sous certaines conditions, être utilisés par l’employeur pour envisager soit une sanction disciplinaire qui peut aller jusqu’au licenciement pour faute grave, soit un licenciement pour trouble objectif causé à l’entreprise.

L’employeur a la possibilité d’utiliser les communications qui ont été faites par les salariés sur les réseaux sociaux mais il devra systématiquement respecter le principe de loyauté de la preuve, ce qui signifie que l’employeur ne doit pas recourir à un stratagème pour recueillir les communications qui ont été faites par les salariés sur les réseaux sociaux.

AD : Qu’est-ce qui pourrait constituer un stratagème ?

PC : Par exemple, un employeur qui créerait un faux profil pour aller espionner, sinon récolter les communications émises par ses salariés sur les réseaux sociaux constituerait un stratagème.

Si l’employeur utilise un stratagème, en recourant notamment à l’utilisation d’un faux profil, alors la preuve ne sera pas recevable en justice puisque l’employeur n’aura pas respecté le principe de loyauté dans l’administration de la preuve.

AD : En cas de sanction ou de rupture du contrat, quid des pouvoirs du juge quand il est saisi ? Quels sont ses pouvoirs de contrôle ?

PC : Le juge va se placer, certes a posteriori, mais dans une situation comparable à celle de l’employeur. Les questions que le juge se posera seront similaires à celles que l’employeur doit ou devrait se poser lorsqu’il est confronté à ce type de situation. Est-ce que la publication relève de la sphère professionnelle ? Quel est le contenu même de cette publication ? Est-ce que le salarié a commis un abus, qui peut être constitué par des propos excessifs, injurieux ou diffamatoires ?

Ensuite, le juge va s’intéresser à l’audience de la publication qui sera liée, bien souvent, au paramétrage du compte. Si la publication a une diffusion assez restreinte, le préjudice pour l’employeur pourrait être assez limité. Au contraire, si la publication a une diffusion très large, le trouble causé à l’employeur peut être nettement plus important.

AD : Alors, évoquons la prévention en la matière. Quels sont les outils dont l’employeur dispose ?

PC : Je recommande systématiquement aux employeurs d’être très vigilants sur la façon de rédiger soit le règlement intérieur, soit la charte sur l’utilisation des réseaux sociaux pour encadrer l’utilisation des réseaux sociaux par les salariés.

Il est également possible d’envisager l’insertion dans le contrat de travail d’une clause visant à limiter ou restreindre la liberté d’expression. En effet, si la restriction est proportionnée et justifiée, l’employeur a la possibilité de restreindre la liberté d’expression.

Enfin, au-delà-même de l’aspect strictement juridique, je recommande aux entreprises de former et de sensibiliser les salariés, de quelque niveau qu’ils soient, afin qu’ils prennent conscience qu’une publication sur un réseau social peut rapidement devenir virale et donc avoir une diffusion extrêmement large.

Dans ces conditions, je pense que la sensibilisation et la formation des salariés, de manière régulière, est une bonne solution pour prévenir les éventuels débordements sur les réseaux sociaux.

 

Consultez l’intégralité de l’article sur Le Monde du Droit et Décideurs TV.

 

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