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Les élections du CSE sont organisées dans mon entreprise dans les prochains jours : qui peut voter?

Pierre Warin répond à diverses questions relatives au CSE dans l’émission “BFM Business avec vous” présentée par Lorraine Goumot et Guillaume Paul.

10 février 2022 dans 60 minutes Business

Guillaume Paul (GP) : Nous allons parler du CSE. De nombreuses entreprises arrivent au terme du premier mandat du CSE, il va donc falloir organiser des élections et beaucoup de questions se posent. On nous demande : « Les élections du CSE sont organisées dans mon entreprise dans les prochains jours. Qui peut voter ? ».

 

Pierre Warin (PW) : L’article L. 2314-18 du Code du travail fixe les conditions pour pouvoir voter dans le cadre des élections du CSE.

Les conditions sont les suivantes :

● Avoir 16 ans révolus ;
● Être salarié de l’entreprise depuis au moins 3 mois ;
● N’avoir fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité en termes de droits civiques.

Par ailleurs, une jurisprudence qui a contribué à exclure de l’électorat certains salariés assimilablesaux chefs d’entreprise a été abrogée par une décision du Conseil constitutionnel du 19 novembre dernier, avec effet au 31 octobre 2022. En effet, le Conseil constitutionnel trouvait l’interprétation par la Cour de cassation trop large puisqu’elle permettait d’exclure de nombreux cadres dirigeants qui resteront par ailleurs probablement inéligibles mais pourront désormais, à partir du 31 octobre 2022, être électeurs et ne pas être exclus sur le seul principe d’une jurisprudence un peu trop floue.

 

GP : Amanda, comptable, nous écrit de Rennes et nous dit : « Les membres de la Direction de l’entreprise sont autorisés à voter pour élire les représentants du personnel. Est-ce que cela fausse les élections et amoindrit le rôle du CSE ? ».

 

PW : C’est toute la difficulté et la contradiction, d’une certaine manière, entre 2 principes.

Le premier principe a été rappelé par le Conseil constitutionnel en novembre dernier. Les salariés, de manière générale et sans exclure particulièrement les cadres dirigeants, ont le droit de participer à la détermination de leurs conditions de travail par l’élection de leurs représentants. Il y a un droit à être électeur.

Par ailleurs, l’élection doit être sincère donc il ne faudrait pas qu’une Direction d’entreprise puisse tenter d’influer sur le résultat par le biais du vote des cadres dirigeants.

En réalité, il est nécessaire de faire la différence entre électorat et éligibilité. L’électorat est le fait de pouvoir voter, au même titre qu’un citoyen et en principe l’ensemble des salariés est concerné. En revanche, l’éligibilité correspond à la possibilité de faire partie de ce contre pouvoir qu’est le CSE et il apparaît logique que les cadres dirigeants ne puissent pas en faire partie. Une limite existe puisqu’on ne peut pas représenter à la fois les intérêts de la Direction et les intérêts de la communauté des salariés.

 

GP : Jean-Pierre nous écrit : « Je n’ai pas de CSE dans mon entreprise qui compte 14 salariés. Puis-je être
sanctionné ? ».

 

PW : La réponse à cette question dépend de la licéité de cette absence de CSE.

Le fait de ne pas avoir de CSE lorsque l’entreprise compte 14 salariés depuis un mois et que, lors des 11 mois précédents, l’entreprise comptait moins de 10 salariés est licite puisque la période de référence pour l’atteinte des seuils d’effectifs est de 12 mois consécutifs.

Une autre hypothèse est valable : si l’entreprise n’a pas de CSE parce qu’il n’y a eu aucun candidat et qu’un procès-verbal de carence valable a été établi, l’absence de CSE est régulière et n’a pas à être sanctionnée.

 

GP : Vous devancez une question que l’on nous pose. Un chef d’entreprise nous dit : « Personne ne veut se présenter aux élections du CSE, que faire ? ».

 

PW : C’est une situation qui peut arriver en particulier dans des petites entreprises où il y a peu de salariés et donc peu de candidats. Il y a aussi des cultures d’entreprises qui vont plus ou moins favoriser cela.

Lorsqu’il y a une absence de candidat, il n’y a naturellement pas d’élu et donc le CSE n’est pas mis en place. Il est nécessaire de rédiger un procès-verbal de carence qui est soumis à un certain contrôle
administratif.

Cependant, sous certaines conditions de délai, n’importe quel salarié peut demander, dans cette situation, la tenue d’élections en se portant candidat à tout moment. Si bien qu’en réalité, cette situation d’absence de candidat et de CSE n’est pas censée être éternelle.

 

GP : Est-ce que tout le monde peut se présenter aux élections ? Faut-il faire partie d’une « liste » ? Comment faire pour se présenter ?

 

PW : Ce sujet fera, selon moi, l’objet d’évolutions dans les années à venir parce qu’il y a actuellement des réflexions sur le fonctionnement du paritarisme et sur le rôle des organisations syndicales.

Le fait de se porter candidat au premier tour des élections du CSE est ce qu’on appelle le monopole des organisations syndicales qui sont compétentes pour l’entreprise en question. Ainsi, vous ne pouvez pas vous présenter comme candidat au premier tour des élections du CSE de votre entreprise si vous ne figurez pas sur une liste portée par une organisation syndicale compétente.

Dans le cas où tous les postes seraient pourvus au premier tour, les élections s’arrêteraient là. Le CSE serait alors rempli de ses titulaires et de ses suppléants. En revanche, si des sièges restaient à pourvoir à l’issue du premier tour, le second tour serait ouvert aux candidatures libres et resterait néanmoins également ouvert à des candidatures portées par les organisations syndicales.

 

GP : Nous avons des questions portant plus généralement sur la vie au travail et les relations sociales au sein de l’entreprise. Un internaute nous dit notamment : « J’ai des relations très tendues avec mon manager. Est-ce que je peux demander à un membre élu d’assister à mon entretien annuel ? ».

 

PW : Le salarié a le droit de le demander mais il n’y a pas d’obligation légale, sauf accord collectif ou statut collectif particulier, pour l’employeur d’accepter cette demande d’accompagnement par un représentant du personnel pour l’entretien annuel d’évaluation.

L’assistance par un représentant du personnel ou, de manière générale, par un salarié de l’entreprise qui peut être représentant du personnel, est prévue pour les entretiens préalables dans le cadre d’une procédure de rupture du contrat de travail et non pas lors des entretiens managériaux.

 

GP : Autre question : « Un élu du CSE de mon entreprise pourrait être licencié. Est-ce légal ? ».

 

PW : Oui, c’est légal à condition de respecter une procédure particulière.

En effet, la spécificité est la tentation pour certains employeurs de licencier des représentants du personnel en raison de leur mandat de représentant du personnel, ce qui est naturellement interdit.

Il y a une autorisation préalable de l’inspection du travail à obtenir et, dans certains cas, il faut également prévoir la consultation du CSE sur le projet de licenciement.

 

GP : Un internaute nous a écrit sur Facebook : « Je me demande si le CSE peut réellement faire pression sur la Direction… Est ce qu’il n’est pas là simplement pour donner bonne conscience au patron ? Quels sont ses outils ? ».

 

PW : Le CSE a des prérogatives importantes en termes de consultation donc il y a une véritable obligation pour les entreprises de consulter préalablement le CSE sur de très nombreuses décisions qui concernent les salariés.

Qui dit obligation de consultation ne dit pas que l’entreprise est liée par l’avis du CSE. L’avis défavorable du CSE n’empêche pas l’employeur de procéder à ce qu’il souhaite, il est purement consultatif. Néanmoins, l’obligation de consultation et donc d’engager une forme de dialogue existe.

Par ailleurs, la tendance de ces dernières années est de permettre aux entreprises d’aller vers plus de flexibilité à condition de conclure un accord d’entreprise.

L’accord d’entreprise doit être conclu avec les délégués syndicaux lorsqu’il y en a mais peut l’être avec le CSE, dans le cas contraire. L’entreprise entre alors en négociation.

Ainsi, la volonté des entreprises d’améliorer leur compétitivité sociale, aussi bien pour les salariés que pour la Direction, passe par un dialogue social avec le CSE ou les délégués syndicaux .

 

GP : Est-ce que l’employeur peut interdire un salarié de voter aux élections du CSE ?

 

PW : Si le salarié répond aux conditions pour être électeur, on ne peut naturellement pas lui interdire de voter ou de l’en empêcher de quelque manière que ce soit.

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